samedi 19 mars 2016

Formes et intérêts du Cloud computing

Le Cloud Computing ou "informatique dans les nuages" prend diverses formes ayant toutes des aspects communs mais également chacune leur spécificité et intérêt. Nous allons expliquer tout ça de la façon la plus simple possible.

Nous avons abordé un certain nombre de sujets préliminaires dans les deux articles listés ci-après ; il peut être utile d'en prendre connaissance en préalable :

Les formes de Cloud Computing

Les 3 formes les plus connues sont, par ordre d'apparition, SAAS, PAAS, IAAS. Une forme plus récente est DAAS.

Dans les 4 formes courantes, AAS signifie "As A Service". Il s'agit donc d'offrir (enfin de vendre, faut pas déconner non plus) un service dont la nature, on l'aura deviné, est précisé par la première lettre. 

S pour Software, logiciel en Français : ici on offre un logiciel répondant à un certain besoin. Nous sommes déchargés du besoin d'acheter, installer, et administrer un ordinateur (plusieurs si on veut de la Haute Disponibilité), un OS, un logiciel. On a juste à utiliser le logiciel accessible via une url dans son navigateur.

P pour Platform : ici on offre une plateforme d'exécution, c'est à dire un logiciel serveur ou un ensemble de logiciels serveurs, sur lequel on peut déployer ses propres applications grâce à une console d'administration accessible via une url dans son navigateur. On est déchargé du besoin d'acheter, installer, et administrer un ordinateur (plusieurs si on veut de la Haute Disponibilité), un OS, un ou des logiciels serveurs (un serveur web, un serveur d'application, un serveur de base de données ...) et selon les offres d'intégrer des composants à ces serveurs (plugins, frameworks de développement intégrés, fonctions optionnelles ...).

I pour Infrastructure : ici on offre une plateforme de virtualisation sur laquelle on pourra créer autant de machines virtuelles que nécessaire (dimensionnées selon ses choix, avec l'OS de son choix), selon ses besoins du moment, voire selon les offres bénéficier de fonctionnalités de provisionning automatique (installation automatique de logiciels serveurs). On est déchargé de l'achat, installation, administration etc. de la plateforme de virtualisation.

Illustration des différents modèles de Cloud
Ce diagramme montre les différentes couches d'un SI virtualisé, avec en gris les parties dont il est possible de se décharger selon le mode de Cloud pratiqué. La première pile "on premise" correspond au cas où il n'y a pas de recours au cloud, donc tout est en bleu pour montrer qu'on gère chacune des briques. La dernière pile "SAAS" correspond au cas où on loue le logiciel et donc tout est en gris puisqu'on ne gère plus aucune brique.


D pour Desktop (bureau en Français): ici on offre un environnement de bureau (tel que vous l'obtenez en installant par exemple Windows sur un PC chez vous) accessible via Internet. On peut ainsi trouver son environnement de bureau où qu'on soit, pour peu qu'on ait un accès Internet, et sur n'importe quel système d'exploitation, pour peu qu'il soit supporté (c'est le cas de tous les systèmes courants) et qu'on ai installé un petit logiciel localement. Cette forme est plus récente et fait appel à des technologies un peu différentes des 3 précédentes, nous la détaillerons plus loin. Une bonne présentation en Français est disponible sur le site de la société virtuelbureau.com

Le PAAS connait de multiples déclinaisons selon la nature de la plateforme proposée en location, ce qui amène certains à créer diverses déclinaisons où le P est remplacé par l'initiale du type de serveur proposé.

Les aspects communs, avantages

Le premier aspect est l'utilisation d'Internet comme infrastructure réseau. D'où le terme de "Cloud Computing". Les informaticiens ont en effet l'habitude de représenter Internet sous la forme d'un nuage dans les diagrammes d'architecture réseau ; le nom vient de là.


Le second aspect est qu'il s'agit d'un modèle économique basé sur la location au lieu de l'achat, et dont les coûts sont corrélés à l'usage qu'on fait du service : plus on les utilise, plus on paye, moins on les utilise, moins on paye (mais il y a toujours un montant fixe minimum).

Ce second aspect est essentiel : 
  • il permet d'ajuster les coûts au niveau de l'activité
  • il permet de démarrer une activité (nécessitant un logiciel, ou une plateforme d'exécution, ou encore de la puissance de traitement) sans investissement initial important
  • il permet de tester des idées : en effet puisque l'investissement initial n'est plus obligatoire, on peut lancer quelque chose, et si ça ne fonctionne pas, tout simplement arrêter sans grande conséquence (pas de matériel coûteux à revendre à perte, pas de personnel à recaser ou licencier ...).

Autre point essentiel de nos jours et toujours lié au modèle de location : on remplace des investissements par des charges d'exploitation, ce qui a pour effet de changer la structure du bilan (moins de capital immobilisé), et d'offrir une rentabilité financière à court terme plus attrayante pour des investisseurs (on parle bien ici de la nature financière du capitalisme "moderne", opposée à l'approche patrimoniale classique). C'est la même logique qui pousse les grandes entreprises à vendre leur bâtiments et à louer des locaux. 

Un autre aspect essentiel est que ces mécanismes offrent la possibilité aux PME d'accéder à des technologies auxquelles elles ne pourraient prétendre pour la plupart. Les technologies modernes impliquent en effet des coûts élevés notamment du fait de la multitude de spécialistes coûteux requis pour faire tourner une infrastructure informatique de pointe, et ces coûts cumulés constituent une barrière d'entrée infranchissable sans un solide portefeuille.

Enfin dernier aspect très important de nos jours : la réduction du "time to market". Le temps nécessaire entre une idée et sa concrétisation est très fortement diminué ce qui permet de réagir plus vite aux tendances, avant ses concurrents, et de prendre des parts de marché. Au lieu d'acheter et/ou recruter matériel, logiciel et personnel, on va sur une console d'administration, on fait 3 clics de souris et c'est bon (en réalité c'est un poil plus compliqué mais c'est l'idée générale).

Les aspects communs, inconvénients

Parlons maintenant des inconvénients, car bien sur toute médaille à son revers.

Le premier est lié à la prédictibilité des dépenses : il est en effet très difficile parfois d'estimer à l'avance combien va coûter le service. Si dans le cadre du SAAS c'est assez simple (par exemple, vous allez payer un forfait annuel par utilisateur, et vous connaissez votre nombre d'utilisateur), c'est moins vrai dans le cas du PAAS et surtout du IAAS. Les modèles de facturation proposés par les opérateurs sont très complexes et les opérandes délicates à évaluer. Le recours à des prestataires spécialisés est ici plus que recommandé. Dans tous les cas, la facilité de mise en oeuvre des services implique une grande rigueur dans le suivi qui en est fait, pour éviter d'exploser les compteurs.

Un second est lié à la complexité de la contractualisation avec les opérateurs. En effet, il va falloir définir des niveaux de services garantis (SLA : Service Level Agreement) et des mécanismes de pénalités associés en cas de non respect. En effet, si vous faîtes reposer votre business sur une plateforme exploitée par des tiers, vous voulez être rassuré sur le fait que vous n'allez pas rester sans site de vente en ligne pendant 48H car la femme de ménage a débranché la prise électrique de votre serveur le samedi matin (bien sur aucun risque mais l'image est belle). Et non seulement ce n'est pas simple, tant du point de vue technique que juridique, mais le rapport est déséquilibré car vous avez en face de vous des opérateurs de très grande taille opérant à l'échelle mondiale (Google, IBM, Amazon, Microsoft etc.).

Un autre inconvénient encore est lié au fait que vos données vont être hors de vos murs, et stockées quelque part hors de votre contrôle... 

Outre le côté psychologique de la chose, certaines données sensibles font l'objet de réglementations qui interdisent par exemple qu'elles sortent du pays ou de l'union européenne. Par ailleurs, certaines entreprises sont bizarrement très attachées à la confidentialité de leur fichier client (dingue non !). Si il existe aujourd'hui des acteurs nationaux, force est de reconnaître que tous les plus grands acteurs sont américains... (ils déploient aujourd'hui des datacenter en Europe, encore un point à vérifier avant de contractualiser). Ce dernier point, en ces périodes marquées par les espionnages de la NSA, n'est pas à négliger.

Dernier inconvénient : l'utilisation d'Internet comme infrastructure réseau amène des limitations techniques qui interdisent certains usages, en particulier dans le cas où on a des échanges de données entre le SI interne et une partie externalisée dans le cloud (problème de latence ou de bande passante insuffisante ou non garantie).

Focus SAAS

Le modèle n'est pas nouveau. Il était auparavant appelé ASP (Application Service Provider) mais il a été rebaptisé suivant les tendances marketing du moment.

Les premiers domaines concernés ont été les services tels que la messagerie et les agendas partagés. 

En effet, il n'y a aucune plus-value pour une petite entreprise à financer la gestion de ce type de plateforme en interne ; les moyens étant généralement limités,  il est préférable de les concentrer sur des outils plus orientés cœur de métier. En outre, le petit nombre de boites mails à gérer rapporté au coût de gestion de l'infrastructure ne permet pas nécessairement d'atteindre le point mort en terme de rentabilité (bref, ça coûte moins cher de payer pour un service dans le cloud).



Aujourd'hui on trouve une offre importante en matière de CRM (Customer Relationship Management, GRC Gestion de la Relation Client en Français), de gestion RH, de logiciels comptables, d'ERP (Enterprise Resource Planning, PGI Programme de Gestion Intégrée en bon Français), de suite bureautique plus récemment (Office 365 chez Microsoft par exemple qui propose la suite Office en mode SAAS).

La plupart des éditeurs proposent aujourd'hui leur offre dans le mode SAAS (à la location donc) en alternative à la vente de licence traditionnelle (souvent rebaptisé "on premise").

De nombreux particuliers utilisent des services SAAS sans le savoir pour le stockage de leur photos de vacances ou de leurs fichiers sur Internet : DropBox, GoogleDrive, OneDrive pour ne citer que les plus connus sont des services SAAS.

Focus PAAS

C'est probablement l'offre la moins hétérogène ce qui est assez logique vu la multitude d'environnement serveurs et de stacks applicatives (empilement de frameworks, librairies, technologies) qui existent de nos jours.

Les offres PAAS sont à examiner de près car elles imposent toujours des contraintes importantes en matière d'architecture logicielle et de pratique de développement ; ici encore c'est assez logique, afin de garantir un certain niveau de service les opérateurs doivent s'assurer que les logiciels développés par vos soins et hors de leur contrôle respectent certains principes (afin de pouvoir être load-balancés par exemple, ou encore ne pas effondrer les moteurs de base de données, ou tout simplement s'intégrer harmonieusement dans leur infrastructure).

Focus IAAS

Certaines solutions techniques utilisées par les grands opérateurs de domaine pour leur offre sont accessibles en Open Source.

Elle sont notamment utilisées par des sociétés nationales qui peuvent ainsi élargir leur offre d'hébergement traditionnel (location de matériel dédié ou de m2 dans leurs datacenter) ; ce marché est en plein développement (OVH, Ikoula, Gandi etc.).

Il existe également de nombreux acteurs de plus petite taille à considérer : spécialisés sur certaines domaines d'activité (le réseau des ARSOE dans le cas de l'informatique agricole par exemple), ou hébergeurs visant les PME, ils présentent l'avantage d'être plus souples, adaptables, réactifs, et de proposer des prestations complémentaires liées à l'exploitation des plateformes (les grands acteurs du Cloud ont des offres totalement industrialisées et ne font pas d'exploitation au delà bien sur du minimum de supervision système requis).

Elles sont également utilisées par des grands groupes, qui ont des moyens financiers importants et des DSI très développées, pour exploiter des clouds privés. Rappelons qu'un cloud privé est la même chose que ce qui est proposé par les fournisseurs de solutions IAAS pour leur offre de cloud public, mais installé par l'entreprise dans son datacenter privé et administré par ses soins. Le modèle économique change mais les avantages techniques subsistent (flexibilité, time to market, élasticité, support de la haute disponibilité etc). 

Un Cloud privé hébergé et exploité en externe par un sous traitant est une autre option possible. La différence avec un Cloud public est alors que les serveurs de VM utilisés pour héberger l'infrastructure de virtualisation sont totalement dédiés, ce qui peut rassurer certaines entreprises.

Les deux solutions phares sont CloudStack et OpenStack

Nos inénarrables technocrates Français (rappelez vous Coluche : "donnez leur le Sahara à gérer, dans 5 ans ils achètent du sable") ont voulu créer une offre de Cloud Public National (avec plein de majuscules partout, ça fait plus Français, Meussieur !). L'idée n'était pas mauvaise, il s'agissait de ne pas dépendre d'acteur Américains et de favoriser l'économie Française. Mais bien évidemment ils ont géré l'affaire comme des branques et après avoir  claqué quelques dizaines ou centaines de millions dans le vide, ont fini par abandonner le projet... de toute façon à chaque fois que l'état veut se mêler d'informatique ... Pour plus de détail, voir ce lien sur le projet Andromède.

Focus DAAS

Revenons à la préhistoire de l'informatique : toute la puissance de calcul était centralisée sur un ordinateur unique (mainframe) et les utilisateurs disposaient d'un simple terminal passif (un écran et un clavier).

Dans ce type d'architecture, chaque action de l'utilisateur au niveau de son terminal (appui sur le clavier, action avec la souris) est transmise côté serveur et c'est le serveur qui traite le signal. Si l'action utilisateur implique une modification du contenu affiché à l'écran, alors le serveur envoie un message à l'écran côté client (en fait à un petit programme qui s'exécute côté client et qui gère l'écran) qui se rafraîchit en conséquence.  Le message décrit simplement les zones de l'écran à mettre à jour.

Ce type d'infrastructure est toujours présent dans l'informatique distribuée moderne (serveur X11 sous Linux/Unix, bureau distant Windows etc.). La société Citrix qui commercialise des solutions spécialisées dans ce domaine reste un acteur très important car ce type de solutions, bien que très minoritaire aujourd'hui, présente des avantages indéniables et est irremplaçable dans certains contextes.

Le DAAS est en fait une utilisation de ces solutions d'infrastructure au travers d'Internet. Au lieu d'installer un serveur capable de gérer ce type d'interactions, l'entreprise (ou le particulier) utilise simplement un service localisé quelque part sur Internet (dans le cloud) et bâti sur la virtualisation des postes clients. Côté client, l'installation d'un petit logiciel peu gourmand en ressources est nécessaire. Ce logiciel étant disponible pour de nombreux OS et matériels, on peut retrouver son bureau Windows et exploiter des logiciels lourds sur des machines très peu puissantes et fonctionnant sous d'autres OS (rappelez vous, les traitements sont exécutés côté serveur, ce sont donc les ressources du serveur qui sont sollicitées, pas celle du client qui ne fait qu'envoyer les frappes clavier, et analyser les messages de mise à jour d'écran reçus en retour pour rafraîchir l'affichage).

Comme toujours ce type de solution a des avantages et inconvénients mais sa combinaison avec les technologies de virtualisation en étend encore l'intérêt, en particulier pour les TPE et PME.

Pour finir, le DAAS c'est comme le SAAS sauf que le service consommé, au lieu d'être une simple application en interface web, est un bureau graphique classique avec toutes ses fonctionnalités (installation de logiciels, paramétrage personnalisé etc.). 

Ce type de solution est encore peu connu mais le marché semble amené à se développer. En plus des acteurs traditionnels sur ce marché, Amazon a lancé une offre, et Microsoft a un projet dans les cartons.

Conclusion

Voilà, j'espère que les choses sont claires. 

L'économie du Cloud est encore quelque chose de relativement récent, le taux d'adoption est sans doute moins rapide que le souhaiteraient les grands acteurs du marché mais vu les milliards qu'ils investissent dans ce domaine, et les avantages de la technologie, on peut difficilement douter que ce soit une tendance lourde.

L'usage interne de la virtualisation et la consommation d'applications en mode SAAS ont mis pas mal d'années à entrer dans les mœurs ; mais aujourd'hui c'est devenu très courant. Nul doute pour moi que PAAS et IAAS suivront le même chemin.

jeudi 3 mars 2016

Choix d'une banque pour Entreprise Individuelle

Ouverture d’un compte pro

Je démarre ma petite entreprise, je n’ai pas encore totalement décidé pour le statut mais ce sera une entreprise individuelle. Bien que  ce ne soit pas systématiquement obligatoire selon le statut retenu, il est très préférable pour des raisons fiscales d’avoir un compte dédié à l’activité qui soit séparé du compte personnel.

Renseignement pris, je peux en théorie ouvrir un compte classique « particulier » et l’utiliser pour la gestion de ma petite entreprise. L’avantage est d’éviter les frais que les banques facturent sur les comptes « professionnels ». En effet, il semble que les banques se goinfrent en frais sur ces comptes et qu’il n’est pas inutile de faire jouer la concurrence et de bien se renseigner. 

Un exemple : les banques prélèvent, sur les comptes pro, une « commission de mouvement ». C’est tout simplement une taxe de la banque dont l’assiette est la somme de vos opérations de payement sur une période. En gros, vous payez des frais de tenue de compte pour leur donner votre argent, vous payez votre moyen de payement pour pouvoir utiliser votre argent, vous payez encore un abonnement internet pour pouvoir encore une fois utiliser votre argent, et en plus ils vous font payer cette taxe quand vous utilisez effectivement votre argent. Et on se demande pourquoi les banquiers ont une réputation d’escrocs ?

Un point d’attention : il semblerait que seuls les comptes « professionnels » (au sens de l’offre spécifique commercialisées par la banque et non de la destination du compte) permettent l’utilisation de solutions logicielles qui permettent de rapprocher automatiquement le journal des dépenses/recettes des relevés de compte. Ce qui est à priori très utile dans le cas d’une simple comptabilité de trésorerie (mais pas pour une EIRL optant pour l’IS qui est soumise à une comptabilité d’engagement). 

Mais ça reste une information à vérifier, et par ailleurs je suis informaticien : certes je ne fais plus de développement au titre de mon activité professionnelle, mais je suis encore parfaitement capable d’écrire un programme pour convertir un export CVS, ou autre tel qu’on le trouve dans toutes les solutions de homebanking, vers un format exploitable (pour peu qu’il soit documenté).

Je fais un tour rapide des offres de quelques banques, histoire de voir où je mets les pieds. L’idée ce n’est pas de m’emmerder pour gratter quelques euros mais bien de m’assurer que je ne fais pas le pigeon de base.

Banques traditionnelles

La banque postale

J’ai ouï dire que la banque postale avait une offre « pro » valable.  Je vais aux renseignements, l’idée est de me constituer une base de comparaison avant de benchmarker l’offre de quelques autres banques.

Comme je suis sympa, j’ai fait un audit de leur page web destinée à la présentation de leur offre. GRATOS ! Je suis sur que des consultants spécialisés « MOA CRM digitale web 3.0 banque de détail <compléter par le terme marketing bidon que vous voulez> » »  demanderaient au moins une brique pour ça ;-)

Prise d’informations sur le site web

Alors, l’offre destinée aux professionnels est un « pack » annoncé à 19 ou 25 Euros HT par mois sur le site Internet, dans la formule la plus basique : pour autant qu’on puisse comprendre ça inclut une carte bancaire basique à débit immédiat (Visa Business), l’accès un site web de homebanking,  une assurance moyens de paiement, et bien entendu un compte bancaire (frais de tenue de compte et forfait inclus de commissions de mouvement).

 Alors déjà, premier doute. L’offre est déclinée selon deux formules « LBP @ccess 24 » et « LBP Net Entreprise » (respectivement 19 et 25 Euros). Et absolument nulle part on ne dispose d’information pour distinguer les deux offres et comprendre la différence de 6 Euros. Mystère et boule de gomme, tout ce que j’ai pu « intuiter » c’est que « LBP Net Entreprise » est une version « étendue » (puisque plus chère) du service de homebanking (car « LBP @ccess 24 » est l’offre de service en ligne).

La description de l’offre est peu détaillée, de mystérieux renvois en bas de page précisent de se rendre à la page n° « tant » pour plus d’infos … où ils ont vu des pages  numérotées sur le web ces buses ? Plus tard, je comprendrais qu’il s’agit de références aux pages de la grille tarifaire mais inutile de dire que sur le site ça n’a absolument aucun sens.

Alléluia, en dessous de 10 000 Euros de paiements par mois, il n’y a pas de commission de mouvements. Comme j’ai mauvais esprit, je traduis ça par «  vous payez un forfait comme si vous dépensiez 10 000 Euros par mois  et si comme moi, vos dépenses sont infiniment moins élevées, vous payez pour rien ».

Continuons. Quand je regarde le tarif unitaire de ces différents services, pris indépendamment du pack, la note n’est plus que de 45 Euros pour la carte, 66 Euros pour l’accès Internet et 62.50 Euros pour l’assurance moyens de paiement. Ce qui nous fait moins de 175 Euros. Alors certes, il doit venir s’ajouter là-dessus les frais de tenue de compte (coût inconnu) et la fameuse « commission de mouvement » (qu’est ce qu’elle peut m’énerver celle là) mais elle est fonction d’un taux dont un petit renvoi en bas de page nous dis qu’il faut aller le chercher dans la rubrique « banque au quotidien », rubrique qui bien sur est inexistante (et c’est pas faute d’avoir cherché). Ils ne nous auraient pas mis un lien vers l’information, ben non faudrait quand même pas être transparent sur les tarifs…

Vu sous cet angle, le « pack pro » semble donc plus cher que les services souscrits individuellement. En outre, il inclut la souscription à une assurance moyens de payements totalement inutile : cette assurance sert principalement à la banque à facturer un service qu’elle est tenue de rendre gratuitement par la loi, et pour le reste elle inclut des services dont je n’ai pas besoin, dont je ne pourrais pas bénéficier, où pour lesquels je suis déjà couvert par ailleurs.

Cependant, en l’absence de données précises sur les commissions de mouvement et les frais de tenue de compte, on ne peut pas encore conclure.

J’appellerais bien le service client pour me renseigner mais le seul moyen de les joindre est un numéro payant. Ils sont suicidaires à la Banque Postale, il faut payer pour se renseigner en vue de souscrire… Ils ne sont pas au courant que c’est la crise et que les gens ne se font plus plumer les yeux fermés ?

Donc on te fait un site web tout pourri avec des tas d’infos manquantes, des renvois vers des pages inexistantes, et on te propose d’appeler un numéro pour te renseigner : payant le numéro. Mouais, je ne suis pas un marketeux mais bon ça ne me semble pas très intelligent comme démarche.

Etape suivante : consultation de la fiche tarifaire

Je ne suis pas un spécialiste de la banque de détail, juste un consommateur peut être un peu plus attentif que la moyenne, mais je me dis qu’il doit forcément exister une fiche tarifaire détaillée , sans doute imposée par un texte de loi quelconque, qui va me permettre de trouver les informations qui me manquent.

Un coup d’œil au menu, on à « tarifs ». Hop je clique, j’arrive sur une nouvelle page et là pas de soucis je trouve tout de suite la fiche tarifaire « professionnels ».

Cool, je trouve mes frais de tenue de compte, je vais peut être pouvoir comparer le coût du pack vs le coût des services souscrits individuellement (et une fois dégagées les options inutiles).

Ici encore je bondis devant une pratique qui relève du hold-up : il y a un montant minimum de commission de mouvement : donc, même si vous ne faîtes aucun paiement, on vous fait payer quand même…  Petit calcul, sur la base de 0.04 %, ce montant minimum de 3.75 Euros mensuel correspond à 112 500 Euros de dépense, un montant totalement irréaliste dans mon cas et probablement pour ce type de compte destiné aux petites entreprises individuelles ; il se rapproche bizarrement des 120 000 Euros inclus dans le pack (10 000 mensuels). Ça pue la bidouille pour renforcer l’intérêt du pack, voire augmenter artificiellement les frais de tenue de compte (qui si ça se trouve sont réglementés…). Si j’envisage d’aller chez eux, ce sera clairement un point de négociation.

Par ailleurs le taux est indiqué avec la mention « à partir de ». Et aucune explication bien entendu, sur ce « à partir de ». J’ai eu beau lire en détail la convention de compte, je n’ai rien trouvé. En gros, c’est l’inconnu… totalement inacceptable (et probablement peu légal).

Toujours rien pour expliquer la différence de tarif  entre les deux formules de service de banque à distance (homebanking). A force de fouiller, je finis cependant par trouver l’explication dans la convention de compte (presque 50 pages de texte écrit en tout petit).

Au chapitre «rapprochement automatique du relevé de compte », j’ai comme un doute. L’offre de base ne semble proposer l’export des relevés qu’au format PDF ; pour pouvoir exporter les relevés dans un format exploitable, il semble qu’il faille déjà être éligible à une option qui implique de passer au forfait à 25 Euros (et non plus à 19 Euros), et en outre l’option en question est facturée à prix d’or et fait carrément exploser la note : abonnement au service de 36 Euros mensuel pour commencer, plus un mystérieux 5 centimes par opération dont on se demande bien ce qu’il cache : ce ne serait tout de même pas 5 centimes par ligne dans le fichier (donc par mouvement sur le compte dans le cas d’un relevé de compte) ?

Heureusement Google existe et il semble bien que l’offre internet de base permette l’export des relevés bancaires  au moins en CSV, le support du format OFX qui a existé à une période semblant avoir été interrompu.

L’option « Business » de la carte Visa coûte 4 Euros par an (la carte sans l’option est disponible à 4 Euros de moins). Pas méchant mais ici encore on nous force la main dans le pack sur une option totalement inutile.

Allez, au chapitre des arnaques, je repère aussi les frais de 1.20 Euros pour l’exécution automatique d’un virement permanent, où le virement manuel est gratuit. Prenons un virement mensuel, multiplions par 12 mois, multiplions par quelques centaines de milliers de client, et rapprochons ça du coût du pauvre batch chargé d’exécuter les ordres … aïe, ça fait trop mal.

Conclusion

Le pack (19 * 12 = 228 Euros) est bien plus cher que les services pris individuellement (2.88 *12 de frais de tenue de compte, 3.75 * 12 de commission de mouvement minimale, 5.20 * 12 d’accès Internet, plus une carte bleue Visa classique à 41 Euros annuels, soit 183 Euros ). Une fois bien sur qu’on a dégagé cette assurance moyen de payement qui est inutile, et sans l’option Business sur la carte Visa aussi inutile. Et encore, sans l’arnaque patente sur le montant minimum de commissions de mouvements l’écart serait encore bien plus grand (en fonction du montant des dépenses engagées chaque année).

Bref, la Banque Postale semble bien nous prendre pour des perdreaux de l’année. Elle n’est sans doute pas pire que les autres, mais c’est elle dont j’ai dépouillée l’offre en premier. Elle va maintenant me servir de témoin pour aller interroger quelques autres banques.

Bon vu le temps que j’y ai passé pour une pauvre économie, ce n’est clairement pas rentable (et encore à condition qu’ils n’imposent pas leur pack pro), et les banques jouent surement là-dessus en complexifiant leur offre. Mais bon, c’est plus fort que moi, je ne supporte pas qu’on me prenne pour un canard sauvage

Je vais examiner rapidement l’offre de quelques concurrents mais je ne m’attends pas à ce que ce soit très différent. Quelques recherches rapides sur Internet semblent montrer que le prix moyen pour un service de base tourne autour de 20 Euros/mois, sauf pour les pigeons.


Banques en ligne

Etant donné que d’un point de vue légal et réglementaire, il n’y a pas d’obligation à ouvrir un compte « pro », je vais tenter ma chance avec les banques en ligne.

Boursorama

Contact pris avec Boursorama (tchat en ligne, aucun frais), il m’est confirmé que si une offre professionnelle a existée dans le passé, ce n’est plus le cas. Exit Boursorama.

FortuneoBanq

Contact par téléphone, numéro gratuit, « désolé on ne prend pas les pros. Si on voit des mouvements liés à une activité professionnelle sur un compte, on le ferme ». Exit FortuneoBanq

IngDirect

Contact par téléphone, numéro gratuit. Long temps d’attente.  « Désolé, nos condition générales interdisent l’activité professionnelle et l’ouverture de compte aux personnes morales ». «  Heu, je suis pas personne morale, je suis en entreprise individuelle », la ligne coupe, problème technique. Bon, je n’insiste pas, exit IngDirect

A ce stade, je m’attends à ce que ce soit pareil pour toutes les banques en ligne (bon, pas une grande surprise) ; le marché des entreprises est trop juteux.

BforBank

Contact par téléphone, numéro gratuit, ça ne  traîne pas, on ne prend pas les pros. Exit bForBanq.

HelloBank

Ce n’était pas mon premier choix mais bon tentons le coup. J’y ai déjà mes comptes personnels, et pas mal de liquidités. Peut être de quoi faire levier ?

Comme souvent, c’est une plaie pour les joindre (côté informatique ce n’est guère mieux avec un site régulièrement en carafe et des dysfonctionnements à peine croyables, heureusement que c’est gratuit… encore que depuis quelques mois ça semble aller mieux).

Mais je tombe sur un conseiller dynamique ; si dans un premier temps j’obtiens la même réponse avec toutefois en plus la proposition de rencontrer quelqu’un en agence, j’arrive à expliquer qu’une offre « pro » est surdimensionnée et qu’en tant que profession libérale non réglementée, j’ai juste besoin d’avoir un compte séparé. Renseignement pris, ce serait peut être possible dans ce contexte, il faut faire la demande par la messagerie interne du site pour contacter les personnes habilitées.

J’ai essayé, j’ai essuyé un refus. J’ai fait part du fait que j’allais devoir retirer mes fonds pour les mettre dans la balance dans la négociation avec une banque qui me ferait une offre intéressante. 

J’attends qu’ils me rappellent pour se mettre à plat ventre, d’habitude ça fonctionne, on verra.

Conclusion

Je sais par des témoignages qu’il y a des indépendants qui sont arrivés à avoir un compte chez IngDirect, et je garde bon espoir d’être accepté chez HelloBank.

Pour autant, c’est du cas par cas, et l’exception plus que la règle ; de façon générale, les banques en ligne ce n’est pas trop jouable.

Autres alternatives

Compte-Nickel

Une alternative que j’ai identifiée, et qui commence à être connue, c’est d’ouvrir un compte sans banque. Oui c’est possible et ça s’appelle Compte-Nickel.  

Le niveau de service est réduit au strict minimum mais ça ne coûte que 20 Euros par an pour une carte Mastercard, auxquels il faut ajouter des frais de 1 Euro par retrait. Allez disons que ça nous mène à 70 Euros par an. 

Par contre, il n’y a pas de chéquier, et on ne peut pas non plus encaisser de chèques. Tout ceci n’est pas très gênant dans mon cas.

J’ai contacté la société par mail et ils n’ont pas de fonction d’export des relevés bancaires (autre que format pdf qui n’est pas exploitable).

Solutions bancaires FIDUCIAL

J’ai connu au travers du forum d’un site d’indépendants (http://www.freelance-info.fr/). Ils proposent un compte courant pro à un tarif plus faible que celui des banques traditionnelles (15 Euros/mois) , et en plus il est rémunéré.

La commission de mouvements est incluse, il y a une CB Visa Business, des services web, et les outils de base (chèques, virements, prélèvements, tenue de compte). Je vais creuser leur offre.

J’ai rempli un formulaire, le lendemain on m’a rappelé pour un rapide échange, ils doivent m’envoyer le détail de leur conditions par mail. Pour le moment j’attends encore... Vu que leur première question était sur le montant de mon capital et que ma réponse n'a pas eu l'air de les emballer et que je ne vois rien venir, j'ai quelques doutes.

Conclusion générale

Trouver une banque n’est pas un chemin tranquille. Chercher la solution la plus intéressante est un chantier très consommateur en temps qui ne se justifie pas d’un point de vue économique (gain modeste par rapport au temps passé), sauf si on a du temps à perdre (ce qui est encore mon cas vu que je n’ai pas encore démarré). Par contre, se renseigner un minimum est utile, vu les pratiques douteuses des banques, pour ne pas se faire pigeonner.

Utiliser un compte "particulier" "standard" est possible en théorie mais dans la pratique les banques semblent forcer la main sur des offres plus onéreuses qui proposent des services dont tout le monde n'a pas besoin. Par ailleurs, il semblerait qu'elles ne soient pas motivées plus que ça par les comptes des petites entreprises individuelles, pas assez rentables...

Mise à jour (avril 2016)

Bon finalement Compte-Nickel n'accepte pas les entrepreneurs individuels, seuls les auto-entrepreneurs sont acceptés. Ils doivent sortir une offre en 2016.

Je n'ai finalement pas réussi à forcer la main à HelloBank. Tant pis.

Aucune nouvelle de Fiducial après le premier contact. J'insiste en les re-contactant, nouvel échange, bel effort de ma part pour expliquer que je suis un bon client, et au final je me fais jeter comme un chien, mon dossier n'est pas assez bien pour mériter leur intérêt... tant pis pour eux.

Après avoir consulté une seconde banque (Crédit Mutuel Nord Europe), je suis finalement parti avec La Banque Postale. Les débuts sont un peu pénibles, la procédure d'ouverture de compte est, comment dire, légèrement casse-burettes, m'enfin ce n'est qu'un moment pénible à passer.

Dernier point : j'ai fait un benchmark des offres d'expertise comptable en ligne (je ferais un petit article là dessus) et j'ai, notamment, pu constater que les offres entraient dans deux catégories. Ou le tarif est forfaitaire, ou il est corrélé au nombre de mouvements sur le compte bancaire pro. Ayant retenu l'offre de ECL Direct qui est tarifée au volume, je ne vais finalement pas prendre de carte bancaire sur le compte pro : je paye avec ma carte perso et je fais une note de frais mensuelle pour me rembourser depuis le compte pro et je diminue ainsi fortement le nombre de mouvements. Et le coût de mon compte pro (m'enfin là c'est des cacahuètes, c'est vraiment pour le plaisir de finasser).